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L'interview du mois : Kreo


Kreo, à gauche, Gunther Spade (DJ/Beatmaker) et Tefa (backeur), à droite

Déjà auteur de quatre projets, le rappeur Kreo n'en est plus à son coup d'essai. Après avoir sorti "Ca Yeah" en mai 2014, "Le Coeur y Yeah" en mai 2016, "Le Krunth" en duo avec Gunther Spade, son beatmaker, fin 2016, ce pur nîmois nous présente son projet solo "Salade Nîmoise" et nous fait entrer dans son univers au travers d'une interview que je vous laisse découvrir.

Quelles sont tes influences ? A qui tu t’identifies ?


J’ai beaucoup écouté Don Choa; les délires, les personnages, ça peut venir de là. J’ai 36 ans, j’ai commencé le rap à la fin des années 90, j'ai écouté la vague marseillaise à fond, Troisième Oeil, Carré Rouge, La FF forcément, IAM comme tout le monde. Quelques groupes aussi comme KDD, les Xmen, la Cliqua, toute cette vague de rap.. Alkpote, Jason Voriz aussi, tous ces personnages un peu loufoques, qui sortent de l’ordinaire, qui sont dans le second degré. Moi j’suis beaucoup influencé par ce rap là.


Je trouve que tes influences ont l’air similaires à celle de Neochrome, notamment avec Billy Joe, Jason Voriz, Alkpote…avec ce rap léger, humoristique voire second degré. Tu étais présent sur la mixtape Microbe ainsi que sur la net-tape de Jason Voriz, toutes deux issues de ce label, t’as jamais eu l’idée de rentrer dans leur structure ?

J’ai fait une apparition sur le projet de Jason Voriz ( Trap Manstrr) qui est en fait un morceau issu de mon album. Il préparait une net-tape, il a regroupé ses morceaux, un peu comme j’ai fais sur la Salade Nîmoise.

Sur Microbe de Neochrome, c’est leur Directrice Artistique qui m’a contacté, elle m’a dit qu’elle cherchait de nouveaux poulains pour Neochrome, que ça commençait à s’essouffler. J’avais l’impression de correspondre, c’est comme si elle me disait « On recherche des gars comme toi » mais elle m’a jamais proposé le truc. Elle disait qu’elle cherchait des gars un peu originaux, qui ont du charisme, un délire à eux, qui sortent de l’ordinaire. J’avais l’impression qu’elle me tendait une perche mais qu’elle m’a jamais attrapé avec. Ca m’empêchera pas de continuer.

Hormis Neochrome, tu as travaillé avec d’autres labels?

J’ai été aidé pour l’album « Le Coeur y Yeah » par Polo qui s’occupe du label Raid1 Music. Il s’occupait de nous à l’époque, quand je faisais partie du collectif Légende Urbaine; on avait sorti 3 mixtapes en mode régional, et on avait sorti un album à l’échelle nationale qui s’appelait L’école de ma Rue, en 2000 et quelques… moi et les dates ça fait deux !

Y’avait Le Rat Luciano dessus, Kery James, Larsen, Carpe Diem, le groupe à REDK, 59Grammes de Lille... On avait fait plein de radios, on faisait pas mal d’interviews dans les magazines hip-hop de l’époque, ça commençait à prendre. Le groupe s’est dissous mais ça prenait bien. Le nom Légende Urbaine commençait à être reconnu un peu partout.. Avant ça j’étais avec TPA, c’était mon premier groupe, c’est pour ça que j’ai repris le nom Kreo TPA.


J’ai pu voir que tu avais fait quelques feats avec quelques noms connus du rap francais, comme Alkpote, Sidi Omar ou encore Jason Voriz, peux tu m’en parler? Comment ça s’est fait?

Toujours Polo… Dans le milieu du rap français il est très connu. Il connait pas mal de monde, y’a pas mal de rappeurs dans son répertoire. Tout simplement il m’a demandé qui je voulais sur mon projet, moi d’entrée j’ai dis Alkpote et Jason Voriz. Alors, Jason Voriz vu qu’il vit en Thaïlande ça s’est fait à distance forcément. Il m’a envoyé une instru de Cody Mac Fly avec les pistes séparées, avec sa voix et son couplet et j’me suis rajouté dessus. Par contre Alkpote, ça a été une bonne aventure, j’suis monté sur Paris dans un studio. Je suis arrivé avec mes prods il a choisi celle que je voulais en sachant que ça collait très bien à son style. On a discuté, on a fini d’écrire ensemble, on a enregistré et je suis rentré le lendemain a Nîmes avec mon featuring d’Alkpote dans les valises, c’est passé très très vite. Le mec je l’écoute depuis tout ce temps, j’étais en studio avec lui, c’est passé comme un flash. J’ai fais un morceau avec Sidi Omar aussi, si tu vois qui c’est. C’est un mec qui a feat avec Flynt, il a fait pas mal de morceaux avec la clique Neochrome, avec Seth Gueko, Alkpote, il a pas mal tourné, c’est un ancien aussi. Comme pour Alkpote, on a calé un rendez-vous sur Paris au studio de Dany Boss, le mec de B.O.S.S. D’ailleurs dans mon album il y a un remix de ce morceau, c’est Tyza La Réplik un beatmaker de Montpellier qui m’a retapé une instru, et on a calé les voix dessus.


Le rap t’as apporté beaucoup de bonnes expériences visiblement…


Que du bon, moi le rap ça m’apporte pas d’argent, ça m’apporte juste de rencontrer des gens que je kiffe, d’aller dans des studios où je pensais jamais mettre les pieds en temps normal, ça m’a apporté quelques minettes forcément. Maintenant je suis casé donc voilà (rires). Ca apporte toutes ces choses là quoi. De manger gratuit dans des endroits, de prendre ton petit billet certains soirs de concert, ça m’occupe beaucoup, ça occupe ma vie, même sans y gagner d’argent.

"Les gens sont contents de me voir 5 minutes, on discute, on fume une clope, on échange, et ils prennent le CD, moi je fais une petite photo, un petit snap avec eux, et ils sont contents. Je partage tout ça avec eux."

T’es indépendant ?

J’suis totalement indépendant, j’me lève à 4h tous les matins, de 4h30 à 11h je bosse. Et l’après midi je bosse sur mon rap. Maintenant on a un home studio à nous, mais pour mes 2 premiers albums, on allait dans un vrai studio, donc je payais mes séances, avec mon argent. Du coup après faut vendre, pour récupérer l’investissement. Moi mon but c’est de rattraper mon investissement, faire de l’argent je m’en fiche. J’ai mon travail à coté.

T’as commencé le rap en 97, tu es passé par des groupes, des collectifs, pour enfin faire du solo, qu’est ce qui t’as le plus plu ?

Le solo c’est là où je m’éclate le plus, c’est là où j’ai le plus d’opportunités aussi. Nous à l’époque de TPA y’avait pas Internet, pas Youtube, y’avait rien. C’était des CD gravés, en fait on faisait un son, on le faisait graver et on le faisait tourner. On enregistrait dans des studios pétés, y’avait que sons mal réglés, et ça tournait à mort à l’époque avec TPA, tout le monde avait son CD de TPA sur Nîmes à l’époque, alors que c’était en mode CD gravé avec tag au Posca dessus. On vendait ça 10-15balles je sais plus… Mais ouais j’avoue le solo c’est là où j’m éclate le plus.


Quand on regarde les dates de sorties de tes projets, on peut voir que pendant longtemps tu n’as rien sorti, tu as fais une pause dans le rap ?

J’ai arrêté le rap pendant 5-6 ans après ça, jusqu’à Ca Yeah. J’étais dégouté du rap, j’en écoutais plus, j’en faisais plus, plus d’écriture. Et c’est reparti en 2013, d’un freestyle à l’arrache. Moi je graffe aussi, et on est parti se faire un terrain vague avec les collègues, et mon pote « Sfer » avait un appareil photo, parce que lui c’est un photographe, et je sais pas, j’avais un texte, il m’a filmé, il l’a mis sur Youtube et les gens ont commencé à reprendre le truc.. C’est parti d’un petit freestyle qu’on a fait dans un terrain vague, d’une mauvaise qualité. Et c’est reparti de là, j’me suis chauffé, premier album, freestyle vidéos mieux travaillés, et j’ai vu que y’avait quelque chose qui pouvait arriver derrière, que les gens étaient attirés par mon style, qui justement était camouflé dans mon groupe, qui était étouffé, et là seul je faisais ce que je voulais et ça a bien pris dans la région et même ailleurs.

Tu l’as exportée la salade nîmoise ?

La Salade Nîmoise je l’ai envoyée à Evreux, du coté du Havre, j’en ai envoyé à Toulouse, j’en ai envoyé à la frontière Suisse. Y’a quand même des gens qui commandent le CD alors que c’est clairement écrit Salade Nîmoise quoi. C’est vraiment le projet local quoi. Et maintenant je fais ce que je veux, avec qui je veux.

Comment tu distribues la salade ?

Salade Nimoise c’est un projet payant, sorti uniquement en physique, à l’ancienne. Sur aucune plateforme, la distribution se fait limite sous le manteau. On me contacte sur Snap, Instagram, Facebook, on se rencontre… Moi j’ai rencontré trop de gens comme ça, les gens sont contents de me voir 5 minutes, on discute, on fume une clope, on échange, et ils prennent le CD, moi je fais une petite photo, un petit snap avec eux, et ils sont contents. Je partage tout ça avec eux. C’est à l’ancienne vraiment, de la main à la main. J’en envoie dans mes petites enveloppes à bulles, je vais à la Poste avec mes tas de CD, vraiment à l’ancienne quoi.

Le Coeur Y Yeah il était sur Spotify, Deezer… tous ces trucs là. C’est mon manager de l’époque qui voulait qu’on fasse ça. Celui là il devait être distribué et au dernier moment on s’est pris un rebond, en fait c’était un album calibré pour une sortie nationale, et après on devait être distribué par Musicast, mais ils nous ont fait comprendre que les petits artistes comme moi, qui rapportent des miettes, c’était pas ce qui les intéressait.

"On donne tout. A l’instant T par exemple à la fin j’ai fais monté ceux du premier rang qui étaient fin chauds sur scène, on a joué le dernier morceau 3 fois, ils me l’ont fait refaire 3 fois ! Ca m’est jamais arrivé ça, j’étais comme un fou, ma casquette elle était trempée ! J’étais au bout de ma vie, mais j’ai kiffé."

J’ai vu que tu étais aussi graffeur, quelles sont tes autres activités à part le rap ?


Ouais ouais je graffe toujours de temps en temps, légal ou illégal, mais illégal c’est rare maintenant, 35 ans… y’a pas longtemps j’me suis refait une session la nuit, 3h du matin, dépôt de train avec un pote… Ca m’arrive encore. J’suis un gars du sud, moi j’suis dans le délire fête votive, les taureaux qui courent dans les rues, ça a rien a voir avec le rap , j’en parle pas trop aux gens, mais moi j’suis grave dans le délire taureau. J’suis nîmois, ça fait 35 ans je suis là, je suis jamais parti de Nîmes. Le rap ça m’occupe beaucoup et ça laisse peu de place au reste. Entre les messages, les interviews, les ventes de CD, le rap pour moi il est partout. Le rap c’est tous les jours dans ma vie.


C’est cool de voir que tu as du soutien, ça montre que y’a de l’intérêt pour ce que tu fais, surtout qu’à l’heure actuelle avec les réseaux n’importe qui peut communiquer sur un projet, et toucher beaucoup de monde si c’est bien géré. Tu en penses quoi de tout ça, toi qui a connu les distributions de CD à l’ancienne ?


Malheureusement j’ai des potes ils sortent des projets, ils galèrent, ils sont dégoutés, ils ont 4 likes… et ils lâchent pas l’affaire pourtant personne les suit. Moi je suis beaucoup sur les réseaux sociaux, j’ai compris le délire de mettre telle photo à telle heure etc… ça je l’ai compris tu vois. Y’en a qui le font mal. C’est la base maintenant, j’suis sur Instagram, Snapchat, Facebook, y’a des jours et des heures à respecter, des trucs à pas mettre et des trucs à mettre, de temps en temps je mets une photo avec ma meuf les gens ils sont contents, ça tape 200 likes alors que ça a rien à voir avec le rap, mais ils sont contents de voir un petit peu ta vie personnelle sur les réseaux, ça marque la proximité avec le public. Les réseaux ça me permet de me développer. Après moi j’suis déconnecté de tout ça au quotidien, je suis pas un accroc des réseaux.


Qui sont les gens qui se cachent derrière tes projets, les commis de cuisine de la fameuse Salade ?


Ma nouvelle équipe c’est Tefa pour les backs, et Gunther Spade en DJ/Beatmaker. C’est ma nouvelle équipe et ça le fait, on tourne ensemble depuis 2014. On a fait le premier concert pour l’album Ca Yeah et depuis on s’est pas lâchés. On a fait que travaillé ensemble. Pour les prods donc Y’a Gunther Spade, j’ai beaucoup travailler avec lui. Y’a BlackBeats, c’est Le Dok, c’est chez lui que je vais enregistrer, dans son studio « MasterMusic Studio» à La Calmette, et il travaille aussi pour K Prodz, il a bossé sur une série qui se tourne sur Nîmes qui s’appelle Nemausus. Il travaille aussi avec le VSO. Il m’a fait des beats sur l’album. Sinon on se débrouille par nous même.


Tu as des dates de concerts de prévues ?


Non pas pour l’instant.. On a fait l’Instant T pour la sortie du projet. On avait pas mal enchaîné pour l’album Le Coeur y Yeah, on a fait des concerts pendant 2 ans, encore cet été on faisait la promo pour cet album. On a eu des belles dates, j’ai fais la première partie de Kery James à Paloma, on a fait la première partie d’Anton Serra, celle de Lino d’Arsenïc quand ils sont passés à Paloma... On a eu des belles dates franchement. Ca m’intéresserait d’en faire plus parce que la scène on la croque ! Y’a des semaines on faisait 3 concerts on était comme des gamins, on répétait à fond, on se chauffait.. On donne tout. A l’instant T par exemple à la fin j’ai fais monté ceux du premier rang qui étaient fin chauds sur scène, on a joué le dernier morceau 3 fois, ils me l’ont fait refaire 3 fois ! Ca m’est jamais arrivé ça, j’étais comme un fou, ma casquette elle était trempée ! J’étais au bout de ma vie, mais j’ai kiffé.


J’ai pu voir qu’il y avait écrit « Volume 1 » sur la pochette de la Salade Nimoise, tu nous prépares d’autres repas prochainement ?


A chaque projet je dis que c’est le dernier tu vois, et depuis le premier je dis que je fais un album et j’me casse. J’en ai refais un autre, je me disais j’arrête. Et celui là y’a écrit Volume 1 dessus, donc… Je sais pas ! Ca annonce peut être une suite !


Un grand merci à Kreo pour sa sympathie et sa disponibilité, vous pouvez vous procurer la Salade Nîmoise en contactant Kreo sur ses différents réseaux :


La Page Facebook de Kreo

Sa chaîne Youtube

On termine cette interview en image, je vous laisse découvrir "JN'AP", premier extrait clippé de la Salade Nîmoise réalisé par Aymar Koulaninga.